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7 mars 2013 4 07 /03 /mars /2013 15:38

 

Kate MOSSE, Labyrinthe

 

Kate-Mosse--Labyrinthe.jpg

 

 

Présentation de l'éditeur :

 

Juillet 1209 : dans la cité de Carcassonne, Alaïs, dix-sept ans, reçoit de son père un manuscrit censé renfermer le secret du Graal. Bien qu’elle n’en comprenne ni les symboles ni les mots, elle sait que son destin est d’en assurer la protection et de préserver le secret du labyrinthe, né dans les sables de l’ancienne Egypte.
Juillet 2005 : lors de fouilles dans des grottes, aux environs de Carcassonne, Alice Tanner trébuche sur deux squelettes et découvre, gravé dans la roche, un langage ancien qu’elle croit pouvoir déchiffrer. Elle finit par comprendre, mais trop tard, qu’elle vient de déclencher une succession d’événements terrifiants : désormais, son destin est lié à celui que connurent les Cathares, huit siècles auparavant…
Traduit dans trente-six pays, Labyrinthe vient d’être récompensé aux British Book Awards.

 

 

L'auteur :

 

Kate Mosse est anglaise. Son roman Labyrinthe a été traduit en trente-cinq langues et a connu un immense succès international. Cofondatrice et présidente honoraire du Orange Prize for Fiction, Kate Mosse partage sa vie entre le Sussex et Carcassonne.

 

 

Titre original : Labyrinth

 

 

Année de parution : 2005

 

 

Premières lignes :

 

"LUNDI 4 JUILLET 2005

 

    Un filet de sang coule sur l'intérieur de son avant-bras, fin liseré vermeil sur une manche immaculée.

    Au début, Alice croit que c'est une mouche et ne s'en préoccupe pas. Les insectes font partie des inconvénients inhérents aux sites archéologiques et, pour une raison qu'elle ignore, elle a constaté qu'il y en a bien plus ici, en altitude, qu'en contrebas, sur le site de recherche principal. Puis une goutte écarlate éclabousse sa jambe nue avec la soudaineté d'un feu d'artifice."

 

 


 

 

Mon avis :

 

Prêté par une amie, friande comme moi de romans historiques, j'ai entamé la lecture de cet ouvrage sans idées préconçues quant à son succès ou à sa popularité éventuels. Surfant comme beaucoup d'autres sur la vague rentable des polars historico-ésotériques à la Da Vinci Code (cette fois-ci, il s'agit du thème archi-éculé du Graal), on sent rapidement que Labyrinthe a été conçu pour être un véritable "page turner" (une fois commencé, vous ne pouvez plus le lâcher), le seul ennui étant que derrière cette efficacité un peu tape-à-l'oeil, le lecteur ne trouve bien souvent que du vide... 

 

L'originalité du roman repose sur la coexistence de deux univers parallèles, traités alternativement. En effet, deux héroïnes, deux destins de femmes semblent liés par-delà les siècles : en 1209, la jeune Alaïs, qui vit à Carcassonne, doit à tout prix protéger un mystérieux manuscrit confié par son père, tandis qu'en 2005, Alice (notez la subtile parenté dans le choix des prénoms !) découvre par hasard, au cours de fouilles menées près de la même ville, une grotte abritant deux cadavres et un texte ancien gravé sur la paroi, lequel va l'entraîner dans des recherches de plus en plus dangereuses.

 

Ainsi donc le récit va-t-il suivre ces deux femmes, sautant sans cesse d'un siècle à l'autre, sur une période de quarante ans pour la partie médiévale et une fourchette bien plus réduite pour la contemporaine. Premier problème pour moi : le manque d'équilibre entre ces deux parties. En effet, l'historique (1209-1249), qui traite principalement de la persécution des Cathares et des débuts de l'Inquisition, m'a semblé nettement plus riche et intéressante, si bien que la période contemporaine fait plus "gadget".

 

En outre (et j'ai conscience de formuler souvent cette même critique), les personnages sont dans l'ensemble assez manichéens : rien pour sauver les "méchants" de leur noirceur d'âme, les "gentils" n'ont évidemment aucun défaut, quant aux inquisiteurs, ce sont tous des bourreaux et les Cathares, des victimes forcément innocentes... Bref, tout cela manque de subtilité et de nuances. Cela n'empêche pas de s'attacher quand même à certains comme Alaïs, héroïne courageuse et volontaire.

 

Quant à l'intrigue, après un début assez lent, elle enchaîne par la suite les rebondissements et tente de faire monter le suspens... ambition pas toujours couronnée de succès ! Parfois cousue de fil blanc (notamment en ce qui concerne la partie contemporaine), l'histoire a au moins le mérite de faire voyager le lecteur (principalement Carcassonne, mais aussi Chartres ou Montségur) et de le dépayser au travers de descriptions intéressantes de la vie quotidienne au Moyen Âge.

 

De même, j'ai apprécié les nombreux mots occitans qui émaillent le texte et contribuent à retranscrire une époque et un terroir. Quant aux recherches faites par l'auteur, elles semblent réelles, ce qui n'empêche visiblement pas quelques erreurs, pointées par des spécialistes. Or ce que j'aime justement dans les romans historiques, c'est la découverte de lieux, de modes de vie et d'événements... pourvu qu'ils soient avérés ! Voilà pourquoi j'en reviens toujours à mes auteurs de prédilection, connus pour leur sérieux et leur légitimité en la matière, Robert Merle et Paul Harding en tête.

 

En ce qui concerne la forme du roman, toute l'originalité de sa construction tient dans ce constant parallèle effectué entre les XIIIe et XXIe siècles, procédé certes plutôt agréable à suivre, mais qui s'avère parfois assez artificiel, notamment lorsqu'on décèle des similitudes quelque peu forcées entre les deux héroïnes.

 

Si on la compare au volume important occupé par l'intrigue principale (l'ouvrage compte quand même près de 800 pages), la fin semble expédiée, comme bâclée. De plus, assez outrancière, elle bascule soudain dans le domaine du fantastique, un concept auquel je n'ai pas du tout adhéré.

 

Je ne m'appesantirai pas non plus sur le style : passe-partout, il est certes fluide, mais assez fade et qui plus est, plombé par une mauvaise traduction (sans compter les nombreuses fautes d'orthographe oubliées au sein du texte).

 

En conclusion, malgré le côté original et plaisant de sa construction (que l'auteur, exploitant visiblement le filon, a repris sans vergogne pour son ouvrage suivant, changeant juste l'une des deux époques), ce roman, plutôt adapté à la période des vacances, se lira certes facilement et sans déplaisir, mais ne vous étonnez pas si comme moi, il ne vous en reste pas grand-chose une fois sa lecture achevée...

 

 

 

Ma note :

 

5 étoiles5 étoiles (sur dix).

 

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28 janvier 2013 1 28 /01 /janvier /2013 15:50

 

 

Ken FOLLETT, Un monde sans fin

 

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Présentation de l'éditeur :

 

1327. Quatre enfants sont les témoins d’une poursuite meurtrière dans les bois : un chevalier tue deux soldats au service de la reine, avant d’enfouir dans le sol une lettre mystérieuse, dont la teneur pourrait mettre en danger la couronne d’Angleterre. Ce jour lie à jamais leurs sorts... L’architecte de génie, la voleuse éprise de liberté, la femme idéaliste, le guerrier dévoré par l’ambition : mû par la foi, l’amour et la haine, le goût du pouvoir ou la soif de vengeance, chacun d’eux se bat pour accomplir sa destinée dans un monde en pleine mutation – secoué par les guerres, terrassé par les famines, et ravagé par la Peste noire. Avec Un monde sans fin, Ken Follett nous offre une nouvelle fresque historique aussi séduisante et captivante que Les Piliers de la Terre, cette superbe épopée romanesque qui avait pour cadre l’Angleterre du XIIIe siècle.

 

 

L'auteur :

 

Ken Follett est né au pays de Galles en 1949. Il est l’un des auteurs de best-sellers et de thrillers d’espionnage les plus renommés, mais c’est avec ses romans historiques qu’il a connu ses plus grands succès (vingt millions d’exemplaires vendus à travers le monde). Plusieurs de ses romans ont été adaptés au cinéma et à la télévision. Il vit en Angleterre avec son épouse, députée travailliste.

 

 

Titre original : World without end

 

 

Année de publication : 2007

 

 

Premières lignes :

 

            " Gwenda n'avait pas peur du noir, et pourtant elle n'avait que huit ans.

 

      Quand elle ouvrit les yeux et ne vit que l'obscurité autour d'elle, elle n'en fut aucunement effrayée. Elle savait où elle se trouvait : étendue à même le sol sur de la paille, auprès de sa mère, dans le long bâtiment en pierre du prieuré de Kingsbridge qu'on appelait l'hospice. À en juger d'après la chaude odeur de lait qui chatouillait ses narines, Ma devait nourrir le bébé qui venait de naître et n'avait pas encore de nom."

 

 


 

 

Mon avis :

 

Après avoir dévoré à l'adolescence Les piliers de la terre (parus en 1989), célèbre roman historique de Ken Follett se déroulant dans l'Angleterre du XIIe siècle, je me réjouissais à l'idée de retrouver cette période, ce style et des personnages aussi attachants. Si la lecture de ce pavé de 1 286 pages a dans l'ensemble été plutôt agréable, quelques bémols ont gâché ces retrouvailles.

 

Pour ceux qui s'attendraient à une suite directe du précédent opus, première déception : si Un monde sans fin se déroule dans la même ville fictive, Kingsbridge, plus de deux siècles se sont écoulés depuis Les piliers de la terre, si bien que mises à part de très rares allusions d'ordre généalogique (certains personnages seraient les lointains descendants de Tom et Jack les Bâtisseurs, héros du premier livre), les deux ouvrages s'envisagent tout à fait séparément.

 

Point commun, en revanche, l'intrigue se déploie ici aussi sur une très longue période (environ trente-cinq ans), permettant ainsi de suivre les multiples personnages, depuis leur enfance jusqu'à un âge presque mûr (du moins, pour l'époque !).

 

Au tout début du livre, les destinées de quatre enfants de milieux sociaux différents sont donc liées après qu'ils aient assisté dans les bois à un combat entre un mystérieux chevalier et deux soldats de la reine, épisode tragique duquel découleront un secret et un serment.

 

L'auteur nous fait croire que cet événement sera crucial pour la suite de l'histoire, or il n'en est rien, à peine sera-t-il mentionné à nouveau de loin en loin (sans doute pour nous éviter de l'oublier) avant de ressurgir à la toute fin du livre, procédé assez artificiel s'il en est (d'autant que ladite révélation s'avère assez décevante).

 

En fait, il s'agit surtout d'un moyen pour faire se rencontrer ces quatre personnages que tout sépare, et entrelacer ensuite leurs trajectoires, lesquelles ne cesseront plus dès lors de se croiser, rarement pour le meilleur et surtout pour le pire...

 

Merthin, futur architecte de génie, Caris, femme rebelle qui cherche encore sa place dans le monde, Gwenda, issue des classes les plus pauvres et devant se battre pour sa survie, et enfin Ralph, frère cadet du premier, homme d'armes violent et antipathique, sont donc les héros principaux du roman.

 

Autour d'eux gravitent de multiples personnages secondaires, au point qu'il est parfois ardu de resituer chacun dans son contexte. À part Caris, et Merthin (dans une moindre mesure), qui sont plus nuancés, les autres sont dépeints d'une façon un peu trop manichéenne à mon goût.

 

En effet, une séparation binaire s'opère rapidement entre les "méchants", qui rivalisent de cruauté et de bassesse, et les "gentils", qui le sont parfois à la limite de la niaiserie. Par exemple, les deux frères, Ralph et Merthin, sont tellement diamétralement opposés au niveau du caractère que l'on peine à y croire.

 

Préparez-vous en tout cas à ronger votre frein, car durant les trois quarts du roman (et souvenez-vous à quel point celui-ci est gros !), ce sont bien les "méchants" qui remportent toutes les victoires, engendrant chez le lecteur une frustration qui va grandissant, d'autant que les "gentils", ces perpétuels naïfs, ne semblent jamais mettre à profit leurs expériences passées pour s'éviter de nouveaux coups durs. Résultat : on déteste les uns, sans pouvoir vraiment s'attacher aux autres, trop brimés et accablés de malheurs pour emporter notre adhésion.

 

Seule Caris tire, à mon avis, son épingle du jeu : il s'agit en effet d'une réelle héroïne féministe, prête à tous les sacrifices pour choisir sa vie, vivre pleinement et surtout, avoir la liberté d'explorer tout son potentiel (elle voudrait être médecin, chose inacceptable pour une femme à cette époque). Pour cela, elle ira jusqu'à renoncer à l'amour de l'homme dont elle est pourtant éprise, car elle ne veut dépendre de personne. Fière et déterminée, rebelle mais réfléchie, courageuse et audacieuse, c'est le seul personnage auquel je me sois réellement attachée.

 

Quant aux principaux thèmes abordés (trahisons, amour, meurtres, violence, hypocrisie, luttes de pouvoir), leur répétitivité finit par lasser un peu, de même que les scènes de sexe que l'auteur juge utile de nous infliger très régulièrement et qui n'apportent pas grand-chose à l'intrigue (j'y vois une analogie, le ridicule en moins, avec celles des Enfants de la terre, tout aussi redondantes et superflues).

 

Le rendu historique est en revanche très plaisant à la lecture, on apprend de nombreuses choses intéressantes sur le commerce, la religion, le profond fossé existant entre les différentes classes sociales à cette époque, la grande Peste noire (vous n'éternuerez plus jamais sans arrière-pensée !) et les maigres moyens de s'en prémunir, les tares et vices du clergé... Seule l'architecture (élément pourtant central de l'histoire) n'occupe peut-être pas toute la place qu'elle aurait mérité. Quelques anachronismes viennent hélas gâcher le plaisir de la reconstitution et par conséquent, jeter un doute sur tout ce que l'on avait lu précédemment... dommage !

 

Du point de vue de la construction, l'auteur n'emploie pas une trajectoire chronologique linéaire, il fonctionne par périodes, elles-mêmes séparées par plusieurs années qui nous sont résumées au début chaque nouveau cycle. L'abondance de personnages fait que leurs histoires ne cessent de s'entrecroiser, pendant que les rebondissements se succèdent, dont certains sont relativement prévisibles.

 

Dans l'ensemble, je trouve que le texte aurait gagné à être resserré et élagué, afin de couper quelques longueurs et aussi de nous épargner la violence gratuite de certaines scènes, en particulier celles de viol. Quant au style, fluide et assez plaisant à la lecture, il m'a néanmoins semblé d'une qualité inférieure à ce dont je me souvenais des Piliers de la terre, mais peut-être est-ce dû à la traduction ?

 

Pour conclure, malgré la longueur du roman, quelques pages éprouvantes et la frustration souvent ressentie à la lecture, cette dernière est agréable de par le dépaysement qu'elle procure au lecteur, pourvu qu'il soit assidu et fasse preuve de constance !

 

 

 

Ma note :

 


6 étoilesSix étoiles (sur dix). 

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4 janvier 2013 5 04 /01 /janvier /2013 17:44

 

 

La faute à Rousseau vous souhaite une merveilleuse année 2013,

remplie de mots, de coups de coeur, d'émerveillements littéraires

et de belles heures de lecture...

 

 


 

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"Tous les hommes font la même erreur, de s'imaginer que bonheur veut dire que tous les voeux se réalisent."

Léon Tolstoï

 


Tous les hommes font la même erreur, de s'imaginer que bonheur veut dire que tous les voeux se réalisent.

Léon Tolstoï

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14 novembre 2012 3 14 /11 /novembre /2012 16:22

 

Jostein GAARDER, Le monde de Sophie

 

 

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Présentation de l'éditeur :


À la veille de ses quinze ans, Sophie Amundsen, jeune fille « presque modèle », reçoit une lettre d’un mystérieux individu. À l’intérieur, une seule phrase : « Qui es-tu ? » C’est le début d’une étrange correspondance qui l’amène peu à peu à partir sur les traces des plus grandes figures de la philosophie. Un roman initiatique paré de magie devenu grand classique de la littérature contemporaine.

 

 

L'auteur :

 

Né en 1952 à Oslo, Jostein Gaarder a donné des cours d'histoire des idées et de philosophie avant de se consacrer à la littérature (nouvelles, histoires courtes, livres pour enfants). Il est principalement connu pour son ouvrage Le monde de Sophie, traduit en 53 langues et imprimé à 30 millions d'exemplaires. En 1997, il a créé le Sophie Prize, qui récompense chaque année des initiatives en faveur du développement et de l'environnement.

 

 

Titre original : Sofies verden

 

 

Année de publication : 1991

 

 

Premières lignes :

 

    " Sophie Amundsen rentrait de l'école. Elle avait d'abord fait un bout de chemin avec Jorunn. Elles avaient parlé des robots. Pour Jorunn, le cerveau humain était un ordinateur sophistiqué. Sophie sentait qu'elle n'était pas tout à fait de son avis. On ne pouvait pas réduire l'être humain à une machine, non ? "

 

 

Extrait :

 

"Qu'est-ce qu'il y a de plus important dans la vie ? Tous les hommes ont évidemment besoin de nourriture. Et aussi d'amour et de tendresse. Mais il y a autre chose dont nous avons tous besoin : c'est de savoir qui nous sommes et pourquoi nous vivons."

 

 


 

 

Mon avis :

 

Écrit il y a plus de vingt ans, j'en avais seize à la lecture de ce livre, presque comme l'héroïne, d'où une identification évidente à l'époque. Avec mon bac littéraire en ligne de mire, ce roman phénomène semblait tout indiqué pour réviser en douceur. Si je lui consacre aujourd'hui un article, c'est que l'ayant relu récemment, j'ai eu l'impression que l'un de nous (voire les deux !) avait pris un coup de vieux dans l'intervalle...


Plaisant dans sa construction, le récit mène trois histoires de front : d'abord celle de Sophie, jeune fille de bientôt quinze ans, qui à l'approche de son anniversaire reçoit soudain d'étranges lettres porteuses de questionnements existentiels, tels que : "Qui es-tu ?", ou encore : "D'où vient le monde ?"

 

Ensuite, celle de Hilde, une jeune inconnue lui ressemblant beaucoup, à laquelle son père envoie des cartes postales du monde entier... lesquelles arrivent mystérieusement chez Sophie. Enfin, l'histoire plus linéaire des idées philosophiques, dispensée à Sophie par l'étrange professeur Alberto.

 

Nous parlons donc ici d'un roman initiatique offrant au lecteur de lui exposer les bases des courants de pensée du monde entier, tout en respectant la chronologie (on commence ce voyage dans l'Antiquité). La personnalité des plus grands philosophes y est décrite, de même que leur éventuelle appartenance à un courant, sans oublier l'impact de leur réflexion sur la société de leur temps.


Chercher à vulgariser la philosophie est une démarche noble et salutaire, cette matière allant trop souvent de pair avec des qualificatifs comme "rébarbative", ou "réservée aux seuls initiés". Si la lecture de cet ouvrage peut amener le néophyte à réfléchir tout en lui donnant le goût d'en apprendre davantage, alors selon moi le contrat est d'ores et déjà rempli.

 

De plus, j'apprécie la façon dont l'auteur a su rendre l'idée de continuité, en montrant à quel point les frontières entre les philosophes pouvaient être poreuses, d'où des influences réciproques. Le roman permet de comprendre les nombreuses interactions entre tous ces théoriciens des idées, ce qui change du cloisonnement habituel dans lequel l'enseignement traditionnel a tendance à les enfermer.

 

Pour en venir à présent aux quelques bémols notés lors de ma récente lecture, je dois avouer que le charme qui m'avait portée tout au long de ce livre lors de mon adolescence n'a pas agi la seconde fois. Mes premiers reproches concernent le style (fade) et les dialogues (un peu plats), peut-être imputables, il est vrai, à une médiocre traduction.

 

Quant au personnage pourtant assez attachant de Sophie, très présent au départ, il s'efface un peu au fil de l'histoire alors que les théories philosophiques très claires du début sont progressivement remplacées par des maniements de concepts de plus en plus complexes, voire même arides (je pense notamment à Kant).

 

En ce qui concerne l'histoire de Sophie et d'Alberto, laquelle n'est en fait qu'un prétexte permettant de dérouler des passages purement didactiques, elle connaît vers les trois-quarts de l'ouvrage un brusque rebondissement que je tairai, mais qui mène tout droit à une fin quelque peu alambiquée.

 

Pour conclure, je pense que ce roman doit être considéré comme un complément agréable à de vrais cours de philosophie plutôt que comme une solution de remplacement de ces derniers.

 

Nonobstant, j'apprécie à sa juste valeur le but poursuivi par l'auteur à destination de son lectorat et qui apparaît en creux : découvrir et se nourrir des théories et des grands courants d'idées passés et présents, puis les comparer avant de les digérer afin de parvenir à sa propre conclusion. Tout ceci revenant en fait à grandir en apprenant à penser par soi-même...

 

 

 

Ma note :

 

 

6 étoiles Six étoiles (sur dix).

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28 septembre 2012 5 28 /09 /septembre /2012 14:27

 

 

Patrick MODIANO, Rue des boutiques obscures


 

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Présentation de l'éditeur :

 

Que reste-t-il de la vie d'un homme ? Une photo, au fond d'une boîte ou d'un tiroir, des papiers administratifs, quelquefois une fiche de police ou un nom dans un Bottin. Et aussi les souvenirs de ceux qui l'ont connu ou rencontré. Ils seront de moins en moins nombreux et leurs souvenirs de plus en plus vagues. Ainsi l'écho d'une vie décroît-il jusqu'à s'éteindre tout à fait. À supposer que quelqu'un puisse revenir sur Terre après sa mort, que retrouverait-il de lui dans les lieux qui lui étaient familiers et dans la mémoire des autres ? Et qui pousse un certain Guy Roland, employé dans une agence de police privée que dirige un baron balte, à partir à la recherche d'un inconnu disparu depuis longtemps ? Le besoin de se retrouver lui-même après des années d'amnésie ? Au cours de sa recherche, il recueille des bribes de la vie de cet homme qui était peut-être lui et à qui, de toute façon, il finit par s'identifier. Comme dans un dernier tour de manège, passent les témoins de la jeunesse de ce Pedro McEvoy, les seuls qui pourraient le reconnaître : Denise Coudreuse, Freddie Howard de Luz, Gay Orlow, Dédé Wildmer, Scouffi, Rubirosa, Sonachitzé, d'autres encore, aux noms et aux passeports compliqués, qui font que ce livre pourrait être l'intrusion des âmes errantes dans le roman policier.

 

 

L'auteur :

 

Patrick Modiano est né en 1945 à Boulogne-Billancourt. Il a fait ses études à Annecy et à Paris et publié son premier roman, La Place de l'Etoile, en 1968. Il a reçu le prix Goncourt en 1978 pour Rue des Boutiques Obscures et le Grand Prix national des Lettres pour l'ensemble de son oeuvre en 1996. Il est aussi l'auteur, en collaboration avec Louis Malle, du scénario de Lacombe Lucien.

 

 

Année de publication : 1978

 

 

Premières lignes :

 

"Je ne suis rien. Rien qu'une silhouette claire, ce soir-là, à la terrasse d'un café. J'attendais que la pluie s'arrêtât, une averse qui avait commencé de tomber au moment où Hutte me quittait." 

 

 


 

 

Mon avis :

 

N'ayant jusqu'ici jamais rien lu de Patrick Modiano, découvrir cet auteur réputé par le biais du roman qui lui valut le prix Goncourt me semblait une heureuse coïncidence. Finalement, cette lecture m'a quelque peu déroutée, mais je ne nie pas que cela soit effectivement de la littérature et j'ai d'ailleurs davantage goûté la forme que le fond de cet ouvrage. 

 

Ceci m'amène à l'intrigue du roman : en 1965, Guy Roland, un détective frappé d'amnésie, se lance à la recherche d'un homme mystérieux et simultanément, sur les traces de son propre passé brumeux, lequel date principalement de la Seconde Guerre mondiale. Ce personnage et narrateur principal tente donc, on ne sait pourquoi, de reconstituer la vie d'un certain Pedro, auquel il va progressivement s'identifier, au point de se persuader qu'il s'agit en fait de lui-même.

 

Ce roman d'enquête, voire même de quête tout court, emprunte aussi quelques éléments au genre classique du roman policier : un détective, une investigation, des témoins et... de nombreuses fausses pistes. Au cours de ses recherches, qui débutent à Paris, Guy est confronté à divers lieux et personnages cosmopolites, notamment dans le cercle des émigrés russes.

 

L'auteur semble particulièrement attaché aux thèmes de la mémoire, des souvenirs, de l'identité, des secrets, de la paternité et de l'abandon, récurrents au sein du livre et qui (selon ce que j'ai appris par la suite) font directement écho à sa propre histoire personnelle et familiale, assez mouvementée.

  

Certes, on pourrait lui reprocher de se complaire dans une certaine lenteur, chose qui ne me rebute pas, bien au contraire. En revanche, j'ai éprouvé un intérêt assez modéré pour les personnages, auxquels il m'a été difficile de m'attacher davantage que superficiellement.  

 

De même, l'intrigue en tant que telle ne m'a pas réellement passionnée ni tenue en haleine, néanmoins, j'ai apprécié la douce mélancolie se dégageant du livre, ainsi que le fait de ne pas avoir toutes les réponses, ce qui met le lecteur dans le même état de confusion que le narrateur.

 

Peut-être est-ce dû à la composition "impressionniste" de l'ouvrage, qui semble bâti à partir d'une juxtaposition de petites touches, aboutissant ainsi à une multiplication de facettes, comme dans un prisme. En effet, l'auteur navigue fréquemment entre personnages, points de vue et même narrateurs, entremêlant les destinées de chacun en une sorte de puzzle, parfois un peu ardu à suivre pour le lecteur.


Quant à la construction proprement dite, elle s'appuie sur des chapitres courts, une langue agréable à lire, un style fluide et épuré, sans oublier ce fameux je-ne-sais-quoi dans le rythme, impalpable mais bien présent, qui finit par séduire tout en douceur. Petit bémol : la fin plus qu'ouverte, un peu frustrante.

 

Pour conclure, si à la lecture de ce roman j'ai éprouvé un brin de déception vis-à-vis de mes attentes de départ, son atmosphère nostalgique et sa subtilité de ton m'ont suffisamment plu pour me donner envie de poursuivre la découverte de cet auteur tout à la fois énigmatique et insaisissable.

 

 

 

Ma note :


 

6 étoilesSix étoiles (sur dix).

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20 juillet 2012 5 20 /07 /juillet /2012 16:18

 

 

Milena AGUS, Mal de pierres


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Présentation de l'éditeur :

 

Au centre, une jeune Sarde « aux longs cheveux noirs et aux yeux immenses ». Toujours en décalage, toujours à côté de sa propre vie. Autour d'elle, des personnages secondaires, peints avec une touche d'une extraordinaire finesse : le mari, épousé par raison pendant la guerre ; le Rescapé, dont l'empreinte sera indélébile ; enfin, la petite-fille, narratrice de cette histoire qui permettra à l'héroïne de se révéler dans sa vérité. Mais sait-on jamais tout de quelqu'un ?

 

 

L'auteur :

 

Milena Agus, née à Gênes en 1959, est cette inconnue sarde qui n'avait pas rencontré de succès en Italie et a pourtant enthousiasmé la presse, les libraires et le public français avec Mal de pierres en 2007. Ce succès s'est finalement propagé en Italie, lui permettant ensuite d'accéder à la notoriété dans les treize pays où elle est aujourd'hui traduite. Lauréate du prix Elsa Morante, du prix Forte Village en Italie et du prix Relay en France, les droits de son Mal de pierres ont été achetés pour le cinéma par Nicole Garcia.

 

 

Titre original : Mal di pietre

 

 

Année de publication : 2006

 

 

Premières lignes :

 

"Grand-mère connut le Rescapé à l'automne 1950. C'était la première fois qu'elle quittait Cagliari pour aller sur le Continent. Elle approchait des quarante ans sans enfants, car son mali de is perdas, le mal de pierres, avait interrompu toutes ses grossesses. On l'avait donc envoyée en cure thermale, dans son manteau droit et ses bottines à lacets, munie de la valise avec laquelle son mari, fuyant les bombardements, était arrivé dans leur village."

 

 


 

 

Mon avis :

 

Encore une fois, je vais aller à l'encontre d'un grand succès de librairie, même si je n'ai (comme souvent) découvert sa popularité qu'après sa lecture, ce qui me permet donc de livrer sur cette oeuvre un avis que je pense objectif.

 

Ce roman s'attache aux destins de trois générations d'une famille sarde, principalement après la Seconde Guerre mondiale. La narratrice nous conte en particulier, à grand renfort de retours en arrière, l'histoire de sa grand-mère, considérée comme folle et mariée tardivement à un homme qu'elle n'aimait pas. Atteinte de calculs rénaux (le fameux mal de pierres, que l'on retrouve en titre) qui l'empêchent de mener ses grossesses à terme, elle va rencontrer lors d'une cure thermale celui qui restera à jamais son unique et véritable amour...

 

Lorsqu'on lit ce résumé, tous les ingrédients semblent présents pour concocter une grande saga romanesque, pleine de rebondissements, de souffle et de sentiments. Avant d'en venir aux reproches, j'accorde toutefois au roman sa faculté de dépaysement, la Sardaigne étant, du moins il me semble, une destination peu communément traitée dans la littérature.

 

Ce point positif reconnu, j'en reviens au problème principal : l'auteur ne parvient pas, selon moi, à exploiter convenablement tous les ingrédients susnommés pour les transformer en quelque chose de suffisamment consistant pour être mis sous l'oeil de son lecteur.

 

La froideur générale dans laquelle ils baignent rend les personnages fort peu attachants, si bien que l'histoire d'amour (pourtant centrale) entre la grand-mère et le Rescapé manque cruellement d'émotion et de corps, voire même de sentiments. On se prend alors à imaginer ce que la plume sensuelle, sauvage et enfiévrée d'une Isabel Allende aurait fait de cette histoire...

 

Quant aux multiples thèmes abordés que sont la folie (et sa définition, toute subjective), l'amour à contretemps (la grand-mère n'éprouvera de vraie passion qu'après son mariage et... pour quelqu'un d'autre que son époux), le sacrifice, l'incommunicabilité entre les êtres, les non-dits et les secrets de famille, bien que prometteurs, ils sonnent finalement un peu creux et leur traitement trop superficiel peine à emporter mon adhésion.

 

Du point de vue de l'écriture, celle-ci, brève et sèche, est aussi aride que les paysages sardes. Je sais que certains lecteurs sont très friands de phrases courtes, mais décidément, cela ne fonctionne que très rarement sur moi, et seulement lorsqu'il s'agit de véritable littérature !

 

Je regrette donc que ce livre manque de chair, ainsi que d'un vrai style, car celui de l'auteur semble parfois trop oral et peu tenu. Enfin, la construction en puzzle se veut certes originale, mais l'abus des retours en arrière finit par embrouiller le lecteur, qui se perd un peu au fil des différentes époques, d'autant qu'il lui faut composer avec un rythme plutôt mollasson.

 

Cette sécheresse et cette froideur m'ont donc constamment tenue à l'écart de l'histoire, me coupant des personnages et m'interdisant toute émotion. D'ailleurs, quatre ans après sa lecture, il ne me reste pas grand-chose de ce roman, que l'on peut doublement qualifier de lapidaire : de par sa brièveté d'abord, mais aussi en référence au sens étymologique du terme, qui vient faire écho à son titre.

 

 

 

Ma note :


 

4 étoilesQuatre étoiles (sur dix).

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21 avril 2012 6 21 /04 /avril /2012 14:44

 

 

Joseph ROTH, Le poids de la grâce


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Présentation de l'éditeur :

 

L'oeuvre de Joseph Roth est faite d'ironie, de dérision, d'humour et d'une infinie compassion pour ses personnages. Une grande liberté d'expression alliée à une précision méticuleuse, une extrême rigueur, en font l'un des plus grands prosateurs de la langue allemande. Il a ce goût viennois de la plaisanterie, de la pointe amère et sceptique. Mais il a aussi un côté « prophète » qui s'exprime en particulier dans Le Poids de la grâce, et qui l'apparente parfois à Isaac B. Singer. Treize romans, huit récits, trois volumes d'essais et de reportages et un millier d'articles... voilà ce qui nous reste aujourd'hui de Joseph Roth. À un enfant qui lui posa un jour la question : « Pourquoi écris-tu toujours ? » il répondit simplement : « Pour que le printemps revienne ». Nicole Chardaire.

 

 

L'auteur :

 

Né en 1894 en Autriche-Hongrie, dans une ville désormais située en Ukraine, Moses Joseph Roth était journaliste et écrivain, né dans une modeste famille juive germanophone. Après la Première Guerre mondiale, il devint journaliste et chroniqueur à Vienne, publiant ses premiers écrits. Exilé à Paris dès l'arrivée au pouvoir des nazis en Allemagne (lesquels détruisirent d'ailleurs ses livres), il y mourut en 1939, alcoolique, malade et sans le sou.

 

 

Titre original : Hiob. Roman eines einfachen Mannes

 

 

Année de publication : 1930 

 

 

Premières lignes : 

 

"Voici déjà bien des années que vivait à Zuchnow un homme qui avait pour nom Mendel Singer. Il était pieux, il craignait Dieu et n'avait rien d'extraordinaire : c'était, en somme, un de ces Juifs tels que l'on en voit tous les jours. Il exerçait modestement le métier de maître d'école." 

 

 


 

 

Mon avis :

 

Pourtant chaudement recommandé par qui me l'avait prêté, j'avoue être totalement et irrémédiablement passée à côté de ce livre. Impression confirmée lorsque j'ai lu après coup certains avis dithyrambiques à son sujet, me faisant presque douter de ma réaction première, que je maintiens cependant.

 

Apparemment pensé comme une parabole évoquant le personnage biblique de Job (ce que j'ignorais lors de ma lecture), ce roman était en France, du moins jusqu'à cette année, étrangement crédité d'un titre fort éloigné de l'original, lequel est : Job. Roman d'un homme simple. Ce thème de la mise à l'épreuve divine (Dieu dépouille Job de ce qu'il possède et aime, y compris ses enfants, avant de tout lui rendre pour le récompenser d'avoir accepté ce châtiment sans jamais douter de sa foi) constitue en effet la trame même de l'histoire.

 

Mendel Singer, maître d'école hébraïque fort pieux, vit avec sa femme Déborah et ses quatre enfants dans une petite ville de Russie. Son fils aîné, Jonas, va s'enrôler dans l'armée du Tsar, tandis que le cadet, Chémariah, s'exile aux États-Unis, justement pour échapper à cette incorporation. Sa fille Miriam s'offre au premier cosaque venu (il s'agit d'une ville de garnison) et son plus jeune fils, Ménouhim, épileptique, semble mentalement retardé.

 

Mendel, Déborah et Miriam finissent par tout quitter pour rejoindre Chémariah à New York, abandonnant le petit dernier à un couple sans enfants, qui en échange prend possession de leur maison. Des années plus tard, après bien des deuils et des désillusions, Mendel se rebellera enfin contre son Dieu, qui l'a traité si cruellement, cherchant sagesse et rédemption avant de les trouver d'une façon pour le moins inattendue...

 

Tout au long de la lecture de ce court ouvrage, je me suis sentie mal à l'aise, sans vraiment parvenir à savoir pourquoi. Dévorant d'habitude sans peine des pavés de plusieurs centaines de pages, j'ai réussi à m'ennuyer en à peine 250. Tout d'abord, les personnages m'ont semblé au mieux, inintéressants, au pire, antipathiques, quant à l'histoire en elle-même (pourtant dramatique), elle ne m'a pas émue une seule seconde. Ce manque d'intérêt et d'attachement envers les protagonistes a été pour moi rédhibitoire, d'autant que l'écriture n'a rien fait pour contrer ce ressenti négatif.

 

En effet, je n'ai pas du tout apprécié le style de l'auteur, beaucoup trop sobre et dépouillé à mon goût, pas plus que ses phrases courtes et sèches, voire même anémiques, le tout donnant au livre un rendu pour le moins étriqué. Ceci, combiné à une atmosphère extrêmement lourde faite de repentance, de péché et de doutes, explique le réel soulagement éprouvé en terminant cette lecture.

 

Je reconnais cependant à l'auteur un indéniable talent d'écrivain, mais attendant sans doute beaucoup (trop ?) de son livre et privée de toute information quant à son contexte de création, je ne suis pas parvenue à y entrer, restant donc parfaitement imperméable à l'émotion qui semblait pourtant s'en dégager.

S'il s'agit certes de littérature, disons seulement que celle-ci ne me parle pas...

 

 

 

Ma note :


 

  4 étoilesQuatre étoiles (sur dix).

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4 avril 2012 3 04 /04 /avril /2012 16:06

 

 

Gregory David ROBERTS, Shantaram


 

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Présentation de l'éditeur :

 

Australie, 1980. Le héros s'évade de prison et atterrit sous la fausse identité de Lindsay Ford (dit Lin) dans les rues fourmillantes de Bombay, où il espère disparaître. Il pénètre peu à peu le monde secret de la "ville dorée", où se côtoient prostituées et religieux, soldats et acteurs, mendiants et gangsters. Fugitif sans famille, Lin cherche inlassablement à donner un sens à sa vie, d'abord en improvisant un dispensaire dans un bidonville, puis, à l'échec de celui-ci, en faisant ses premières armes dans la mafia de Bombay. Cette quête le conduira jusqu'à la guerre, à la prison et ses tortures, à une série de trahisons sanglantes, puis à la rédemption, enfin. Mais les clés du destin de Lin se trouvent entre les mains de son mentor, Khader Khan, parrain de la mafia, à la fois criminel, saint et philosophe, et surtout de Karla, femme mystérieuse, belle et dangereuse dont Lin tombe follement amoureux. Ce roman épique nous plonge dans une Inde fascinante et marque l'entrée en littérature d'une voix extraordinaire.

 

 

L'auteur :

 

Gregory David Roberts est né en Australie en 1952 sous le nom de Gregory John Peter Smith. À 24 ans, il sombre dans l'addiction à l'héroïne après son divorce et la perte de la garde de sa petite fille. Une série de vols, commis à l'aide d'un faux pistolet, lui vaudront le surnom de "Gentleman Bandit". Il est condamné en 1978 à dix-neuf ans de prison, s'évade en 1980 et passe dix années en cavale à Bombay. Repris en Allemagne en 1990, puis extradé en Australie, il commence à rédiger Shantaram durant ses six années de détention (dont deux à l'isolement), malgré le fait que les gardiens détruisent par deux fois son manuscrit ! Sorti de prison, après avoir vécu quelques temps à Melbourne, en Allemagne et en France, il retourne finalement s'installer en Inde, à Mumbai, se consacrant à l'écriture, ainsi qu'à sa fondation aidant les plus pauvres privés d'assurance médicale. Shantaram est l'un de ses surnoms indiens, donné par la mère de son meilleur ami, et qui signifie "Homme de paix".

 

 

Titre original : Shantaram

 

 

Année de publication : 2003

 

 

Premières lignes :

 

"Il m'a fallu du temps et presque le tour du monde pour apprendre ce que je sais de l'amour et du destin, et des choix que nous faisons, mais le coeur de tout cela m'a été révélé en un instant, alors que j'étais enchaîné à un mur et torturé. Je me suis rendu compte, d'une certaine façon, à travers les hurlements de mon esprit, qu'en dépit de ma vulnérabilité, de mes blessures et de mes chaînes, j'étais libre : libre de haïr les hommes qui me torturaient, ou de leur pardonner."

 

 

 

Extraits :

 

"Les prisons sont des temples où les diables apprennent à prier."

 

"Les pires torts causés le sont par des gens qui voulaient changer les choses."

 

"J'ai maudit le propriétaire des taxis à la fin de notre négociation, en me servant de la malédiction la plus polie et la plus horrible du monde des affaires en Inde : « Je vous souhaite d'avoir dix filles et qu'elles fassent toutes un beau mariage."

 

"Un homme politique, c'est un type qui te promet un pont, même quand il n'y a pas de rivière."

 

"La patience et la concentration obsessionnelle sont les pierres précieuses que l'on extrait des tunnels de la solitude en prison."

 

"Si nous envions quelqu'un pour les bonnes raisons, nous avons fait la moitié du chemin vers la sagesse."

 

"J'ai senti le parfum des secondes se répandre autour de nous."

 

"La culpabilité est le manche du couteau que nous employons contre nous-mêmes, et l'amour en est souvent la lame."

 

"Je maîtrisais cet art et c'était une des cent façons pour moi d'imiter leur vie et de me glisser dans les replis de lotus de leur lutte pleine d'amour et d'espoir contre le destin."

 

"Je fumais à cette époque-là parce que, comme n'importe quelle personne qui fume, je voulais mourir au moins autant que je voulais vivre."

 

 

"Le passé se reflète éternellement entre deux miroirs, le miroir éclatant des mots et des actes, et le miroir obscur des choses que nous n'avons pas accomplies ou dites." 

 

"Chaque jour, quand vous êtes en cavale, représente la totalité de votre existence. Chaque minute de liberté est une histoire qui se termine bien."

 

 


 

 

Mon avis :

 

J'ai lu plus de 120 livres depuis Shantaram et pourtant, il n'est jamais complètement sorti de ma mémoire. Quant aux ouvrages parvenant à sa hauteur, sur ladite centaine, ils se comptent sur les doigts d'une main. Ce préambule explique à quel point ce roman fut vraiment ma révélation de 2009, roman dont, selon la formule consacrée (et je vous l'accorde, fort éculée), "je ne suis pas sortie indemne" !

 

Je l'avais pourtant entamé comme bien souvent, c'est-à-dire dans une confortable ignorance de son auteur comme de sa réception critique, si bien que l'on ne peut me soupçonner d'avoir été influencée par autre chose que le talent de l'écrivain et mes propres émotions.

 

La difficulté est maintenant de parvenir à transcrire sans trahir : donner aux autres envie de lire ce livre, mais sans trop en dire et ne pas me perdre non plus en dithyrambes, sous peine de décevoir les futurs lecteurs, qui s'en seraient fait une trop haute opinion. Je dois également admettre qu'il est nettement plus facile de critiquer (voire d'accabler !) un ouvrage que l'on a détesté, plutôt que d'encenser celui que l'on a adoré...

 

Tout ceci étant posé, je me lance : roman autobiographique (je reviendrai sur cette appellation), mais aussi roman-fleuve (plus de 900 pages), roman protéiforme, roman picaresque, Shantaram est tellement foisonnant que l'esquisse d'un résumé ne peut lui rendre justice. Disons simplement que le héros, australien, arrive en Inde, à Mumbai (Bombay), après s'être évadé de prison. Tombé sous le charme (voire l'emprise) de cette ville grouillante et tentaculaire, il va y vivre dix ans, se recréant un monde et une famille à travers de nombreuses péripéties et aventures.

 

L'exploit de l'auteur est d'avoir brillamment réussi à marier pas moins de six grands types de romans : d'amour, d'aventures, de voyage, politique, initiatique et philosophique. Cette plongée (parfois en apnée) extrêmement dépaysante (mot bien faible pour rendre l'étourdissement qui prend le lecteur à la découverte de cet univers) au coeur de l'Inde s'éloigne vite des itinéraires balisés pour touristes et s'attarde sur des lieux nettement moins "glamour" : campagne, prisons, bidonvilles...

 

Au cours de ses tribulations, le héros, qui se fait appeler Lindsay (ou Lin, ou Linbaba, ou... Shantaram), croisera une multitude de personnages foisonnants et hauts en couleur, à commencer par le sympathique Prabaker, son guide à l'incroyable sourire, sans oublier son mentor et quasi père adoptif Khaderbhai, chef de la mafia locale et néanmoins philosophe, la dangereuse mère maquerelle Madame Zhou et bien sûr, la belle Karla, dont il tombe irrémédiablement amoureux.


Ce qui fait la force de ces personnages, c'est leur constante ambivalence, depuis Lin lui-même, jusqu'à son père spirituel (homme de violence, mais aussi de sagesse et de lumière), en passant par la femme mystérieuse dont il est épris. Une autre constante de ces protagonistes est leur incroyable humanité, qui nous les rend extrêmement attachants.


Seul et étranger à ce pays, à cette ville, à cette langue et à ces coutumes, Lin cherchera à se recréer une famille, à tisser des liens et par-dessus tout, à se pardonner à lui-même en trouvant un sens à sa vie. On pourrait certes lui reprocher parfois une certaine naïveté, mais celle-ci vient contrebalancer une telle noirceur tout autour de lui (où règnent pauvreté, violence et misère), qu'elle en devient au contraire extrêmement précieuse, presque vitale à sa survie.  


L'une des choses appréciables dans ce livre tient au profond respect qu'il montre envers les autres cultures, respect qui poussera par exemple le héros à apprendre plusieurs langues et dialectes indiens, ainsi que certaines coutumes. Le lecteur, comme accompagné par Lin, ne se sent jamais voyeur, mais indien comme lui, notamment lorsqu'il en vient à habiter dans le plus grand bidonville de Mumbai, lequel compte plus de 700 000 personnes !

 

C'est justement l'occasion pour le roman d'aborder certaines scènes d'une violence inouïe, extrêmement bien rendue, à tel point qu'on la vit littéralement au travers de l'auteur. Par ailleurs, la notion d'enfermement est omniprésente dans le livre, avec des épisodes intenses et dramatiques en prison (notamment de torture), mais aussi dans la prison virtuelle qu'est la drogue, avec un récit très dur de sevrage de l'héroïne.


Vous l'aurez compris, cet ouvrage fait passer le lecteur par toute une gamme de violentes émotions : rire, larmes, horreur, réflexion, suspens (même si on l'oublie parfois, le héros est en cavale et on tremble à l'idée qu'il soit repris). Lin, héros fort et fragile, dissimule au monde ses fêlures derrière un physique rude et intimidant, mais nous fait ressentir tous ses doutes, ses failles, ses complexes (comme sa prétendue laideur, face à la beauté de celle qu'il aime), sa culpabilité et ses manques. C'est précisément cette vulnérabilité d'enfant rêveur et naïf dans un corps de brute qui m'a particulièrement touchée et bouleversée à la lecture.


Quant aux thèmes abordés, ceux de la rédemption et de la solitude reviennent très fréquemment, de même bien sûr que l'Inde, véritable personnage à elle toute seule, qui semble synthétiser chaque facette des contradictions de Lin : beauté, humanité, mais aussi violence, cruauté, solitude au sein même de la multitude... Pour reprendre la formule d'un lecteur, Shantaram est un "manuel de survie d'un Montaigne, mâtiné de Mesrine" : je pense que tout est dit !

 

Outre ces thèmes récurrents, le livre fait également l'éloge de certaines valeurs, parmi lesquelles la patience (dont un prisonnier possède une réelle expérience), l'honnêteté (ce qui peut sembler paradoxal, au vu du passé et du mode de vie du héros), la fidélité à ses amis, l'altruisme, la générosité, l'entraide, l'abnégation, le courage, l'audace, la sagesse, la réflexion, la loyauté et le don de soi.


Pour en finir avec le fond, les seuls petits bémols que je pourrais avancer concernent tout d'abord le terme d'"autobiographie". Il semble en effet assez incroyable qu'une seule personne puisse connaître autant de vies en une seule, endosser autant de personnages, vivre autant d'aventures. Certes, ici on ne sait pas toujours où s'arrête la réalité et où commence une certaine fiction, mais après avoir refermé le livre, on réalise qu'en fait, ce n'est pas si important. Second et dernier petit reproche : quelques passages philosophiques (notamment dus à Khader Khan) sont peut-être trop appuyés et semblent parfois un peu "plaqués" sur le récit.

 

Ceci m'amène à aborder à présent le sujet de l'écriture du roman, or, divine surprise, la forme s'avère aussi riche, dense et travaillée que le fond (alliance rare, s'il en est !), avec un sens certain de la formule, de très belles images et une réelle inventivité dans l'écriture (vous pourrez en juger en lisant les extraits cités plus haut).

 

Le style protéiforme de Gregory David Roberts, à l'image des multiples visages de Lin (tantôt voyou, médecin, trafiquant, magouilleur ou soldat), ne craint pas certaines envolées lyriques, voire même poétiques. Extrêmement bien écrite et très bien traduite, son écriture charme et séduit. Ajoutons à cela un rythme très dynamique faisant que l'on ne s'ennuie jamais, d'autant que de nombreuses péripéties se succèdent sans faiblir.

 

Grâce à une solide construction, l'histoire reste fluide et cohérente (en dépit des fréquents rebondissements, des personnages pléthoriques et des nombreux changements de lieux), prouvant la maîtrise de l'auteur. N'oublions pas que son manuscrit fut détruit par deux fois en prison, ce qui a sans doute eu une influence déterminante sur le résultat final. Enfin, je tiens à souligner son réel talent pour les descriptions : les personnages, les odeurs, les couleurs, les rues, la ville et ses bidonvilles nous immergent dans un pays fascinant, qui depuis lors est réellement devenu le sien.

 

Roman envoûtant, dense, riche et profond, Shantaram est certes un "pavé", mais que l'on cherche pourtant à déguster afin de ne pas le finir trop vite, et qui m'a laissée émerveillée (de même qu'un peu anéantie) par tant d'émotions, avec la sensation d'avoir vécu une expérience quasi mystique, en compagnie d'un homme exceptionnel. Je mets donc au défi les futurs lecteurs de cet ouvrage d'enchaîner avec un autre livre juste après avoir lu celui-ci, car tous sembleront bien fades en comparaison !

 

 

 

Ma note :


 

10 étoiles Dix étoiles (note maximale).

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8 décembre 2011 4 08 /12 /décembre /2011 16:02

 

 

Lorris MURAIL, Ce que disent les nuages

 

 

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Présentation de l'éditeur :

 

Colin a été choisi comme messager. Du secret qu'il détient pourrait bien dépendre l'avenir d'une planète qui court à sa perte : la Terre. À moins qu'un maléfique adversaire ne cherche à en profiter pour son propre salut...

 

 

L'auteur :

 

Né au Havre en 1951, Lorris Murail, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris et père de quatre filles, écrit depuis l'âge de seize ans, parfois à six mains, avec ses soeurs Elvire et Marie-Aude (Golem). Auteur de nombreux livres et de séries pour la jeunesse (Dan Martin), il est également critique littéraire, traducteur d'anglais et journaliste gastronomique !

 

 

Année de publication : 2009

 

 

 


 

 

Mon avis :

 

Visiblement, Lorris Murail est plutôt populaire dans le domaine de la littérature jeunesse (de même que ses soeurs), ce que j'ignorais lorsque j'ai entrepris la lecture de cet ouvrage, dans le but d'en faire la correction. Quant à en définir précisément la nature, disons qu'il tente de faire cohabiter mysticisme et science-fiction dans une sorte de parabole, ou de fable, à la portée assez ambitieuse.

 

On peut d'ores et déjà en juger d'après le synopsis : alors que la France subit les conséquences dramatiques d'un important réchauffement climatique, un enfant d'une dizaine d'années prénommé Colin, qui joue aux abords d'un puits à sec situé dans le jardin de ses parents, reçoit soudainement un mystérieux message délivré par un ange... avant de sombrer dans le mutisme.

 

Le secret qu'il détient malgré lui éveille alors la convoitise d'un milliardaire sans scrupules, Georges Murphy, qui espère trouver dans le décryptage de ces paroles rien moins qu'un chemin vers le mythique Jardin d'Éden, afin de s'y abriter de l'apocalypse qui semble proche. Après être parvenu à se faire confier l'enfant, il lui adjoint une institutrice et un garde du corps, Béatrice et Thomas, qui deviendront les alliés et protecteurs de Colin dans ce monde en déliquescence.

 

Le choix du contexte dans lequel se déroule l'histoire est intéressant : une Terre polluée et meurtrie par l'Homme, lequel commence à en subir les retombées dévastatrices, sous forme d'une sécheresse permanente. Le discours écologiste sous-jacent laisse entrevoir ce qui attend l'Humanité tout entière, du moins pour ceux qui ne seront pas élus, et donc pas sauvés.

 

Cette notion de rédemption irrigue en effet tout le livre, accompagnée de l'avertissement moral suivant : tout l'argent du monde ne pourra jamais acheter une conscience, ni même garantir le salut. Pour preuve, Murphy se retrouve aussi impuissant que les autres, en dépit de son immense fortune.

 

Second thème développé dans l'ouvrage, la lutte éternelle entre le Bien et le Mal, si profondément ancrée dans notre culture judéo-chrétienne. En illustration de ce message typiquement biblique, de nombreuses valeurs positives telles que l'altruisme, le sacrifice et le désintéressement sont récompensées, tandis que la convoitise et l'égoïsme de Murphy seront finalement punis.

 

S'appuyant sur une solide documentation, l'auteur disserte abondamment sur tout ce qui a trait aux anges décrits dans la Bible (fonctionnement, hiérarchie, typologie), ce que j'ai trouvé plutôt intéressant. Il est également agréable de se sentir dépaysé, notamment lorsque l'action se déplace au bout du bout du monde en Terre de Feu, donnant lieu à des descriptions parfois poétiques.

 

En ce qui concerne les personnages, je suis plus critique. Colin, l'enfant autour duquel tourne pourtant toute l'intrigue, est selon moi trop fade, trop en retrait par rapport à l'avalanche d'événements extraordinaires qui lui arrivent.

 

Cette passivité face à son destin (que l'auteur veut sans doute rendre comme de la sagesse) met rapidement une distance vis-à-vis du lecteur, qui ne parvient pas à s'y attacher, si bien que les personnages d'abord secondaires que sont Béatrice et Thomas finissent par lui voler la vedette. Précisons d'ailleurs que l'histoire d'amour qu'ils partagent, presque platonique, ne fait qu'ajouter à certains stéréotypes dont ils souffrent.

 

Quant au rythme, après une première partie plutôt statique et même un peu lente, les rebondissements se succèdent sans faiblir jusqu'à la fin de l'ouvrage. L'écriture agréable, fluide et maîtrisée, fait la part belle aux dialogues. Pour résumer, j'ai passé un assez bon moment de lecture, du moins jusqu'à ce qu'arrive la fin de l'ouvrage, hélas un peu... boursouflée.

 

C'est en effet l'occasion que choisit l'auteur pour basculer dans la science-fiction la plus pure et nous infliger de grands discours un brin pédants mêlant science, théologie et philosophie, ceci afin de développer certaines théories assez osées (voire fumeuses) sur la Vie, l'Homme et sa place dans le Monde.

 

Malgré cette fin décevante et tellement ouverte qu'elle m'a laissée avec plus de questions que de réponses, j'ai lu un livre néanmoins fort plaisant, transportant le lecteur dans un monde très semblable au nôtre et en même temps, très différent (heureusement pour nous). Nul doute que cette atmosphère originale et bien particulière plaira aux adolescents, cible principale de l'ouvrage.

 

 

 

Ma note :


 

  5 étoilesCinq étoiles (sur dix).

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6 octobre 2011 4 06 /10 /octobre /2011 16:38

 

Claudie GALLAY, Les déferlantes

 

 

Claudie Gallay, Les déferlantes

 

 

 

Présentation de l'éditeur :

 

La Hague... Ici on dit que le vent est parfois tellement fort qu'il arrache les ailes des papillons. Sur ce bout du monde en pointe du Cotentin vit une poignée d'hommes. C'est sur cette terre âpre que la narratrice est venue se réfugier depuis l'automne. Employée par le Centre ornithologique, elle arpente les landes, observe les falaises et leurs oiseaux migrateurs. La première fois qu'elle voit Lambert, c'est un jour de grande tempête. Sur la plage dévastée, la vieille Nan, que tout le monde craint et dit à moitié folle, croit reconnaître en lui le visage d'un certain Michel. D'autres, au village, ont pour lui des regards étranges. Comme Lili, au comptoir de son bar, ou son père, l'ancien gardien de phare. Une photo disparaît, de vieux jouets réapparaissent. L'histoire de Lambert intrigue la narratrice et l'homme l'attire. En veut-il à la mer ou bien aux hommes ? Dans les lamentations obsédantes du vent, chacun semble avoir quelque chose à taire.

 

 

L'auteur :

 

Née en 1961, Claudie Gallay exerce encore à mi-temps son métier d'institutrice, en parallèle avec celui d'écrivain. Les déferlantes est son cinquième roman, sur un total de sept parus à ce jour.

 

 

Année de publication : 2008

 

 

Premières lignes :

 

"La première fois que j'ai vu Lambert, c'était le jour de la grande tempête. Le ciel était noir, très bas, ça cognait déjà fort au large.

Il était arrivé un peu après moi et il s'était assis en terrasse, une table en plein vent. Avec le soleil en face, il grimaçait, on aurait dit qu'il pleurait."

 

 


 

 

Mon avis :

 

Ce livre, emprunté et lu durant des vacances au bord de la mer (heureux hasard), était le premier de cet auteur que je découvrais, sans attente particulière puisque son nom m'était complètement inconnu. J'ai éprouvé d'emblée quelques difficultés à entrer dans ce roman, sans doute à cause du foisonnement des personnages, que j'avais du mal à situer, de l'intrigue qui peinait à se mettre en place, ainsi que du rythme, extrêmement lent.

 

Ayant fait l'effort de m'accrocher à cette lecture, son ambiance a fini par me gagner et je l'ai poursuivie avec plaisir. Dans ce récit, l'auteur s'empare des notions de manque et de vide au travers de sa narratrice, ornithologue venue vivre dans un petit village près de la Hague pour son travail, mais surtout pour guérir d'un amour perdu. Elle y rencontre toute une galerie de personnages dont un en particulier, Lambert, semble guidé par une démarche proche de la sienne.

 

Ce livre, assez sombre et plutôt pessimiste, est donc le biais par lequel l'auteur met en avant et développe certains thèmes graves, tels que la perte et le deuil d'un être aimé, les souvenirs, l'importance des racines familiales et le poids des secrets, mais également (et heureusement !) l'espoir d'un renouveau, d'une guérison et d'une reconstruction.

 

À l'image de Lambert et de la narratrice, qui tentent l'un comme l'autre de soigner leurs blessures intérieures, le lecteur croise de nombreux personnages plus ou moins torturés, à la psychologie fouillée, à l'exception notable de quelques uns (assez stéréotypés, voire même peu crédibles). De façon évidente, l'auteur a délibérément choisi de placer ses héros au sein d'une nature rude et tourmentée, induisant une sorte de parallèle entre elle et leurs propres démons.

 

D'ailleurs, la mer et les paysages sauvages du Cotentin sont bel et bien des personnages à part entière, jouant leur partition et créant une atmosphère très particulière, nostalgique, souvent lourde et parfois poétique. Petit bémol : j'avais eu plaisir à découvrir un territoire fort éloigné des clichés venant spontanément à l'esprit lorsque l'on évoque la Hague, cependant, j'ai lu par la suite de nombreux témoignages de protestation de la part de lecteurs natifs de cette région affirmant ne pas la reconnaître, au point qu'ils soupçonnent l'auteur de ne jamais s'y être rendue.

 

En ce qui concerne l'intrigue proprement dite, il faut reconnaître que le livre n'offre pas beaucoup d'action ni de rebondissements, surtout proportionnellement au nombre important de pages qu'il comporte. Quant au suspens, j'ai vu arriver d'assez loin la réponse aux mystères patiemment accumulés au long de l'histoire, laquelle est un peu cousue de fil blanc.

 

Pour en venir à présent à la forme adoptée par ce roman, j'ai déjà signalé son rythme très lent, accompagné de certaines longueurs et de répétitions, peut-être dans une volonté délibérée de la part de l'auteur de se calquer sur le mouvement des vagues. Si un réel effort d'originalité est indéniable, j'émets quelques réserves sur la systématisation de certains effets de style, qui à force semblent plutôt artificiels.

 

Très travaillé, le texte s'écoule avec fluidité, mais sa sécheresse et son âpreté m'ont parfois tenue à distance de toute émotion. Basé sur des phrases courtes et percutantes, le livre est structuré par des chapitres brefs et de nombreux dialogues, au ton un peu trop relâché à mon goût. Ceci, ajouté au sous-emploi de la ponctuation et à quelques tics de langage, m'ont fait regretter les phrases longues, riches et travaillées que j'affectionne en littérature.

 

Pour conclure, les choix narratifs originaux et le style bien particulier de l'auteur m'ont amenée à m'attacher difficilement aux personnages, lesquels éprouvent tellement de vide au fond d'eux-mêmes qu'ils en viennent à manquer de densité et ne sont pas assez présents pour ancrer durablement le récit dans l'émotion.

 

Si j'ai vraiment apprécié les superbes descriptions de la mer et de la nature sauvage, ainsi que l'atmosphère générale dans laquelle baigne le roman, j'ai cependant éprouvé à l'issue de ma lecture une légère sensation de frustration. En effet, j'ai eu l'impression, par certains aspects, de passer à côté de cette histoire sans y entrer complètement, comme s'il lui manquait quelque chose d'intangible pour qu'elle atteigne pleinement son propos...

 

 

 

Ma note :


 

5 étoilesCinq étoiles (sur dix).

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  • : La faute à Rousseau
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  • Correctrice-relectrice ayant une formation d'historienne de l'art, je suis passionnée de lecture et de tout ce qui a trait à la culture : dessin, photographie, expositions, cinéma. N'hésitez pas à visiter mon site de corrections orthographiques : www.lafauteavoltaire.fr
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